Quel est le point commun entre une multi nationale et une organisation à vocation humanitaire ?
À travers une communication et un marketing spécifique, le ralliement des personnes à une cause.
Revenons à l’essence même du marketing social.
Le concept de marketing social prend naissance entre 1969 et 1971 suite à l’article de Kotler et Levy « broadening the concept of marketing » puis suite à la diffusion de l’article « Social marketing : an approach to planned social change » écrit et publié par Kotler et Zalltman.
Le marketing social permet d’étendre le principe du marketing, à une fonction supplémentaire : le ralliement à une idée ou à une cause que l’on veut partager à travers la commercialisation d’un produit.
L’objectif du marketing social est de faire changer les habitudes du consommateur ou du donateur en jouant sur des leviers forts, notamment sur l’engagement, la prise de conscience en même temps que la culpabilisation.
D’ailleurs, les organisations à vocation humanitaire ainsi que les marques jouent sur ce dernier principe d’influence pour lancer leur campagne de communication et la rendre la plus attractive possible.
Plus encore, le marketing social joue sur un levier de persuasion extrêmement bénéfique pour leur instigateur, celui de la sympathie.

Le marketing au service d’une cause …rien n’est moins sûr !

Attention le marketing social n’a aucune vertu sociétale dans le sens d’aide à autrui.
Le marketing social ne revêt donc aucun rôle social.
Il permet à la marque de se différencier en créant un évènement fédérateur.
La marque se positionne comme le porte-parole d’une cause à travers son produit.

Les 4 P du marketing social

 

1. Le produit du renoncement

Plus qu’un produit, le marketing social vend un comportement qui sert à améliorer la société.
La marque propose au consommateur de réfléchir et de changer de comportement.

En adoptant un autre comportement, le consommateur renonce au précédent pour adopter une autre attitude.
Le marketing social veut donner au consommateur la possibilité de se rendre responsable de son acte d’achat à travers une idée, une cause pour laquelle ce dernier adhère.
Il s’agit donc d’un geste militant.

2. Le prix du renoncement

Ce renoncement à un prix, celui de l’opportunité.
La valeur perçue sera donc plus importante aux yeux du consommateur.
Le généreux consommateur aura effectué une bonne action en faisant un achat à répercussion multiple pour lui :

Pour son bien personnel, dans sa recherche du plaisir dans la société où il évolue,

Pour l’image qu’il renvoie (image de responsable citoyen ou militant)

Pour la satisfaction d’être utile et de rendre service à autrui

Le consommateur d’une marque a la sensation de participer à un événement.
Par son achat il apporte sa contribution dans la recherche d’une vie meilleure pour lui et pour les autres.

Il aura le sentiment d’appartenance à une communauté et assouvira autant son besoin de rébellion que celui de reconnaissance.

Au même titre, le produit aura une connotation toute particulière.
Le produit augmentera en termes de valeurs perçues pour le consommateur.
Il ne sera plus considéré comme un « banal » produit acheté en rayon (sans autre forme d’engagement que celui de sa carte bleue dans le terminal bancaire !)

3. La Place du marketing social dans l’univers du public ciblé

Une redistribution intelligente des canaux de diffusion du produit ou service.

Ainsi, dans son application, le marketing social à un rôle de promotion auprès d’un public dédié, au-delà de l’acte de vente.
Il permet de rendre le produit le plus accessible possible à cette cible dans des lieux stratégiques.

Exemple : De nombreuses campagnes sur les préservatifs ont permis de mettre en place dans des zones spécifiques, des campagnes de sensibilisation en proposant sur des présentoirs très attractifs des bulletins d’informations sur les MST, le sida.
Ces campagnes vont jusqu’à équiper et approvisionner des lieux comme des halls de gare, boites de nuit, etc. en distributeurs de préservatifs.
Ces lieux sont choisis d’après la forte concentration de la clientèle ciblée.

La communication poussée à l’extrême peut aussi permettre de rassembler des personnes au sein d’une même communauté et ainsi de développer une base de données très segmentée !

4. Le système de Promotion du marketing social

Justement, les phénomènes de pétitions sont un excellent réservoir pour obtenir rapidement des contacts.
Ce vecteur de communication est d’autant plus accessible que les réseaux sociaux comme Facebook sont d’excellents transmetteurs d’information qui se propagent très rapidement auprès de groupes ciblés. D’ailleurs, le marketing viral est l’un des dérivés du marketing social.

Le cas Benetton

Accusée à tort ou à raison, là n’est pas le débat, Benetton, l’emblématique marque colorée est l’un des grands leaders marquants du marketing social.
Communication osée, chocking, tous les paramètres sont là pour se différencier des concurrents et faire un buzz… mondial.
Souvenez- vous de ces images choque : des personnes malades du sida, des photos de canards englués de mazout, des campagnes anti racistes, etc.
L’objectif final est de conscientiser le public Benetton à une image de citoyenneté responsable et partie prenante pour une cause.
La notoriété de la marque est essentiellement véhiculée par ce moteur : asseoir la notoriété de la marque en lui associant une image de citoyen corporatif.
Des images et messages forts qui irritent, choquent, le tout ne laisse jamais indifférent.
Le revers de manche du créateur du « United Colors of Benetton »
Longtemps apprécié pour le coté buzz de ses messages ultra-choc permettant de communiquer sur des tabous, Benetton essuie un sérieux revers de médaille.
La mise en scène de la condition humaine apporte certes une forme de réflexion et un certain regard sur notre société, mais, au-delà de l’image des annonces choquent, c’est la thématique choisie qui est…ciblée et controversée.

4 phases vont nous permettre de comprendre la logique de communication de Benetton et son mea culpa !

-Jusqu’en 1984, une publicité classique met en scène le produit phare Benetton.
– De 1984 à 1989, la marque Benetton instrumentalise la thématique de « l’égalité des contraires ».

1ere phase :
La marque se lance dans une stratégie autour du thème de l’harmonie du monde recouvert du slogan « UNITED COLORS OF BENETTON ».
Mise en scène des personnes aux races différentes dans un rendu harmonieux.

2eme phase :
Elle revêt un aspect plus géopolitique par la mise en situation des différentes populations du monde.
Les drapeaux symbolisant les différents peuples avec un seul credo : tous citoyens du monde.

3eme phase :
Elle s’amorce vers des idées fortes autour des grands problèmes sociaux relatifs à la condition humaine.
La communication directe sur le vêtement Benetton disparait totalement des tabloïds.
Cette dernière phase est considérée comme celle de la politique sociale de la marque qui se veut témoin de son temps, de faits marquants de ces dernières années.

Jusqu’où peut aller Benetton en matière de marketing social ?

3 critiques sont formulées contre la firme italienne de Luciano Benetton et de son fidèle collaborateur, le photographe Oliviero Toscani.

  • On reproche au photographe Benetton de construire de toutes pièces un paradis artificiel et de mettre en scène un idéal communautaire.
  • Benetton est accusé d’exposer des archétypes raciaux pour imposer son produit (comme si la laine Benetton à elle seule détenait le pouvoir de rallier les peuples !)

L’antagonisme est le suivant : par une seule phrase et son produit, Benetton devient l’expression de l’unité et non de la diversité des peuples…

  • La 3eme critique met en exergue le côté irrespectueux de certaines images (le choc des photos…) et l’indécence du contenu des messages.

4eme phase :
Celle du MEA CULPA
Suite aux critiques essuyées par la campagne marketing précédente (même de ses propres franchisés), Benetton entreprend sa croisade d’apaisement.
Ce grand provocateur fait amende honorable. Cependant, c’est bien mal connaitre le duo Benetton et Toscani !

Ainsi, malgré les d’accusation d’idéalisme, d’exagération de la réalité, Benetton passe à l’action en s’impliquant dans des gestes concrets.
En 2013, la marque détient une autre forme de « scandale » et proclame dans sa dernière campagne : la positive attitude !

You Nguyen le directeur artistique de la marque déclare : « la provocation réside dans le fait d’être capable de parler de choses positives, de montrer le bonheur, la réussite et l’épanouissement.
9 personnalités au profil atypique et provocateur vont contribuer à véhiculer cette nouvelle image.
A ce sujet You Nguyen s’exprime : « It’s about color, not only fashion !” traduction : “L’importance réside dans la couleur et non pas que dans la mode »
discours à double connotation… N’est-ce pas le message du marketing social ?