Retour aux sources…
« Je vous assure Madame Quenotte, je me brosse les dents, 2 fois par jour et toujours de haut en bas comme on me l’a appris » clame haut et fort Mister Chico à sa dentiste tout en joignant à ses paroles les gestes imaginaires d’un brossage de dents que l’on qualifierait d’exemplaire.
Madame Quenotte visiblement contrariée ne comprend pas la subite dégradation de la dentition de son client.
Pourtant, cette dernière aurait pu comprendre la situation de Mister Chico en posant quelques questions ouvertes puis en recoupant celles-ci pour enfin mettre un nom face à l’énigme du moment : les 2 molaires cariées de Mister Chico en moins de 3 mois, un record selon la dentiste !
Cependant, Mister Chico semble de bonne foi.
Il est convaincu de ses dires en apportant la preuve de son sérieux par un brossage de dents imaginaire devant sa dentiste.
Notre patient espère ainsi que cette dernière puisse vérifier…l’invérifiable.
Madame Quenotte ne peut que croire son client.
Elle ne dispose d’aucun élément tangible pour apporter des éclaircissements, analyser froidement et rapidement la situation avant de donner ses préconisations.
Mister Chico a la mémoire qui flanche
En revanche, du côté de Mister Chico, c’est sa mémoire sémantique qui lui joue des tours.
En retranscrivant les mécanismes du brossage de dents devant sa dentiste, ce dernier met en scène le brossage des dents tel qu’on lui a appris, c’est d’ailleurs ce qu’il précise.
Il reprend donc l’apprentissage du brossage des dents à son actif pour expliquer qu’il connait parfaitement l’usage d’une brosse à dents.
Dans un précédent article : « vrai ou faux, les 8 croyances du marketing averti sur la connaissance du consommateur », je fais référence à la mémoire sémantique dans une phrase qui en dit long sur le discours du consommateur concernant ses habitudes de vie : « les gens disent la vérité… même s’ils mentent ».
En partant de ce constat, Mister Chico met en avant les principes d’un bon brossage de dents, il n’y a rien à redire, vous en conviendrez comme moi.
Cependant, si madame Quenotte avait été petite souris, elle aurait observé Mister Chico dans son milieu naturel : sa salle de bains.
Elle aurait rapidement compris que le brossage de dents est en partie une des causes des caries de son client.
En partie…
Ce que Mister Chico a omis de préciser à sa dentiste est sa situation actuelle. Il vient d’obtenir un nouvel emploi.
Ainsi, il part très tôt le matin toujours à la dernière minute, rentre parfois très tard le soir très fatigué.
Depuis 3 mois, Mister Chico ne prend pas toujours le temps de se brosser les dents matin et soir.
Aussi, pour pallier à ce manque, il mâche un chewing-gum pensant qu’il fera office de brossage dentaire.
Le consommateur dans le filet FINDUS
Autre étude de cas ne démontre qu’entre les paroles et les actes, il y a souvent un monde dans les habitudes de comportement de nos semblables.
Plus encore, il y a distorsion entre ce que les gens disent et ce qu’ils font en réalité.
La problématique FINDUS :
Les gens qui mangent des produits surgelés les trouvent moins bons que les produits frais.
C’est en partant de cette croyance que Findus a étudié le comportement des personnes face aux surgelés.
En 2003, les experts Findus décident d’attaquer le problème à sa source en créant une salle de test réaménagé en un espace de cuisine expérimental doté de caméras et de toute la logistique d’observation.
Dans ce lieu unique, le panel consommateurs sélectionné pour l’occasion est invité à cuisiner les produits de la marque dans un milieu reflétant la réalité, celle d’une cuisine.
Les experts analysent leur comportement.
Ils constatent toutes les pratiques, les aprioris, les problèmes des personnes qui cuisinent les surgelés.
Dès lors, la marque obtient une amélioration notable quant à l’utilisation de ses produits et renforce sa communication (préconisations, conseils pour un meilleur usage du produit,…)
Les mailles du filet FINDUS
Cela ne suffit pas !
Findus cherche à optimiser sa communication autour des conseils produits.
Plus encore, il est essentiel que les experts Findus appréhendent les réflexes culinaires des consommateurs dans l’appropriation des produits.
En 2005, ils investiguent directement le consommateur en installant des caméras dans une dizaine de foyers sélectionnés.
L’intérêt est de voir les gens agirent dans leur propre environnement pour comprendre les mécanismes inconscients face à l’utilisation de leurs produits.
Le constat est sans appel
Le 1er constat : la marque remarque que les consommateurs testeurs ne regardent que très peu les indications de cuisson notées sur le packaging (modalités et durée de cuisson, thermostat).
La personne sort le produit de son emballage pour l’enfourner directement dans le four.
Le produit cuit avant d’être directement déposé sur la table familiale.
Autre constat : Les convives sont souvent déçus par la saveur du produit qui ne correspond pas à leurs attentes.
De là un raccourci s’établit entre le produit surgelé à la saveur moins goûteuse qu’un produit frais.
Le phénomène de la mémoire sémantique chez le consommateur
En reprenant, la situation liée à l’art de cuisiner, nous avons tous notre tour de main, nos petits secrets culinaires, notre façon de cuisiner.
Elle nous est propre, d’après notre imagination certes, mais aussi en fonction de notre relation à la cuisine : on adore ou on déteste.
La cuisine entre aussi dans l’apprentissage des gestes de tous les jours issus de notre patrimoine familial.
Reprenons le cas du consommateur. Si celui-ci reprend l’astuce des pâtes à la carbonara cuisinée par sa mère qui elle-même la détenait de mère : réduire la crème fraiche en dehors des pâtes avant de la rajouter aux lardons.
Ce consommateur ne regardera sans doute pas les indications inscrites sur l’emballage du bidon de crème fraiche qu’il tient entre les mains qui préconise l’utilisation de cette crème à froid.
Machinalement, il travaillera sa crème fraiche comme le faisait sa mère, sa grand-mère, comme il l’a toujours cuisiné.
Il faudra donc attirer le consommateur sur un changement d’habitude d’utilisation pour optimiser cette crème et en exalter toute la saveur attendue.
Il faut donc parler d’éducation du consommateur, comme tout apprentissage.
Éduquer un consommateur ne peut s’inscrire que dans le temps et dans la répétition.
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